Comment rattraper le temps perdu ? Il s’est passé à la
fois rien et plein de choses depuis mon dernier article en avril. J’explique ma
disparition avec difficulté. Disons que mon métier m’a amené à énormément lire
depuis 6 ans, même si mon rythme de lecture est effréné depuis mon adolescence.
Mais surtout mon métier m’a forcé à lire des choses que je n’avais pas
forcément envie de lire, parce que c’est nouveau, médiatisé, qu’il faut en
parler, le vendre : le diktat du commerce quoi. On se dit que le livre n’est
pas un produit commercial comme les autres, c’est un objet de passion, mais c’est
comme tout en fait : trop c’est trop.
Alors après Féerie pour les ténèbres je suis tombée dans une spirale (pas
autodestructrice, plutôt relaxante) de visionnage de séries télé. J’ai rattrapé
mon retard sur ce secteur culturel là, il faut dire que je suis passionnée par
la fiction en général, les romans, les films, les séries, c’est que du bonheur.
Lorsque je ne remplissais pas fébrilement un business plan ou que je ne m’esquintais
pas les yeux à éplucher des centaines d’annonces de locaux commerciaux, je me
matais des saisons entières de séries de tous horizons. Quel pied ! Je le
fais encore, mais graduellement j’essaye de me replonger dans mon addiction
première : le livre. Mon intoxication est terminée, je dois m’y remettre.
Pour ce faire, j’ai sélectionné deux poches de ma
bibliothèque pour occuper mon voyage dans la belle province québécoise, l’un est
intitulé Le vaisseau ardent, de
Jean-Claude Marguerite chez Folio SF et pèse bien ses 1500 pages d’aventures, l’autre
que j’ai terminé est plus modeste dans sa composition, se nomme Le lézard lubrique de Melancholy Cove,
de Christopher Moore chez Folio Policier. Comment ne pas tomber amoureuse d’un
tel titre ? Je vous le demande. « Lézard » et « lubrique »
sont deux mots que l’on n’associe pas de manière anodine, mais ils vont
parfaitement ensemble.
Et effectivement, dans la petite ville touristique américaine
de Melancholy Cove, une insignifiante catastrophe nucléaire (hum) va réveiller
un monstre millénaire moult fois mutant, un gros lézard qui n’a qu’une hâte :
se taper une gonzesse. L’automne bat son plein, les touristes sont parti, et la
ville retombe dans une routine familière sans grands bouleversements. Mais en
voici un de taille (au moins gros comme une caravane). C’est sans compter sur
Théo, flic de campagne défoncé qui décide d’enquêter sur le suicide de l’une de
ses habitantes, une population soudain frénétiquement active sexuellement,
un bluesman au cœur tendre, une psychologue déglinguée et une actrice de série
B, Molly alias Kendra l’amazone des terres inconnues, qui se promène en costume
de film, épée en main. Rien ne va donc plus à Melancholy Cove…
Diantre ça fait du bien un peu d’absurde, de la légèreté et
du rire ! N’allez pas chercher une écriture ciselée (au couteau ! comme dirait l’une de mes anciennes collègues),
ni une histoire profonde, sensible et subtile, Le lézard lubrique de Melancholy Cove est un roman dont le titre
décrit à la perfection l’ambiance foldingue, un brin dépravée et jouissive.
Melancholy cove, ce havre de mélancolie, devient le théâtre d’évènements
saugrenus qui mettent les personnages dans des situations surréalistes mais
bidonnantes, et ses habitants nous livrent des dialogues absolument savoureux, drolatiques
au possible, du début à la fin !
Paru initialement en collection Série Noir chez Gallimard, ce roman de Christopher Moore est plus
un ovni frapadingue qu’un roman noir ou une enquête policière, mais cela ne
fait que confirmer les bons goûts de la direction éditoriale qui nous avait
déjà bluffé et séduit avec La bouffe est
chouette à Fatchakulla de Ned Crabb (pépite unique qui raconte les meurtres
sordides - par démembrement – dans un village de péquenauds du fin fond des
Etats-Unis, lesquels préfèrent assigner l’enquête à leur poivrot local –
Sherlock Holmes alcoolique – qu’à leur police régionale) et Fantasia chez les ploucs de Charles
Williams (un enfant de 7 ans nous conte les péripéties de son père bookmaker dans l’Amérique de la
prohibition et de son oncle fermier dont les activités de contrebandes sont une
épine au pied de la police local).
Que vous dire, Le
lézard lubrique de Melancholy Cove est un remède à la mélancolie, pour sûr.
De quoi passer des vacances ensoleillées et amusantes, et voir les lézards d’un
œil nouveau. Je vous le conseille, quoi.
Dès que j’ai terminé Le
vaisseau ardent (j’en suis page 530, c’est long !) je vous en parle,
parce que là c’est tout l’inverse : une langue travaillée, un récit à
tiroirs, une aventure fantastique de piraterie à travers la Hollande, les Balkans
et les Caraïbes, bref un joyau.
A bientôt les amis, avec – on espère- la prochaine fois de
bonnes nouvelles concernant notre future entreprise, on croise les doigts… mais
notre corps de métier et notre jeunesse (26 ans) semble poser problème aux
banques et aux bailleurs : on vit dans un monde où la jeunesse ne peut se
lancer dans entrepreneuriat que si elle est riche de base… Douce France.
Mais on ne baisse pas les bras. Et n’oubliez pas de me
conter vos avis sur les mésaventures du lézard lubrique !

Comme j'avais lu l'autre bouquin de Moore, j'ai acheté celui-là parce que mon fils était curieux de le lire - et mon fils ne lit rien en général. Un bon souvenir même si je me rappelle surtout d'un camion citerne qui subit les pires outrages.
RépondreSupprimerEn tous les cas, je note les deux autres titres cités ici :-)
C'est pas de la grande littérature mais c'est un très très bon moment de lecture, si ça peut faire lire les non-lecteurs, tant mieux ! Pour les deux autres, je les considère comme des romans cultes, encore meilleurs même que celui-là, alors j'espère qu'ils plairont. :)
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