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Mécaniques du ciel, de Tom Bullough


Je ne sais pas pourquoi, mais cette année beaucoup de romans de la rentrée littéraire s’inspirent des sciences. Entre La déesse des petites victoires, Théorèmes vivants, Peste et choléra, Le jour où les chiffres ont disparu, et Mécaniques du ciel, les scientifiques sont les muses des auteurs de 2012, allez savoir pourquoi. Alors fanatiques des nombres, de la biologie et de la physique, jetez-vous dès à présent sur cette rentrée, c'est le moment ! Pour ceux que ça pourrait effrayer, figurez-vous que tout ça reste assez passionnant. On a tendance à l’oublier, mais sciences et littérature font toujours bon ménage. Particulièrement dans le fabuleux Mécaniques du ciel.



J’ai commencé ce roman de Tom Bullough sans savoir qu’il s’agissait d’une histoire vraie, et que son protagoniste était un scientifique reconnu à qui l’on doit beaucoup. Je ne m’en suis rendue compte qu’à la fin, lorsque j’ai compris qui était ce petit garçon du nom de Kostya, fasciné par les chiffres et les étoiles, que l’on suit de son enfance jusqu’à l’âge adulte.

Mais je vais vous conter l’histoire de Mécaniques du ciel comme il se doit, sans rien vous dévoiler en premier lieu, de la même manière que j’ai entrepris ma lecture lorsque j’ai pioché dans la pile gargantuesque des nouveaux romans de la rentrée.

1867, le petit Kostya à dix ans, est l’un des derniers rejetons d’une grande famille de la petite noblesse russe. Suite à une scarlatine douloureuse, il perd une grande partie de l’ouïe. Sujet aux moqueries de ses amis, au sein de  sa famille qui se détourne de lui, il se réfugie dans ses passions, les mathématiques et les sciences. Mais son problème d’ouïe lui pose de nombreux soucis ; rejetés par toutes les écoles, il prend ses clics et ses clacs et part à l’âge de quinze ans arpenter les rues de Moscou, où il vit dans une pauvreté crasse et fait l’apprentissage du monde dans les rayonnages fournis de la bibliothèque de l’université. Bibliothèque dans laquelle il fera le rencontre du philosophe Nikolai Fiodorov, la personne qui lui mettra entre les mains De la Terre à la Lune, le roman de Jules Verne qui déterminera le reste de son existence.



Mécaniques du ciel est en fait l’histoire de Konstantin Tsiolkovsky, considéré comme le père fondateur de la recherche spatiale russe. Loin de conter comment Tsiolkovsky à mené à bien ses recherches pour l’avancée de l’astronautique, Tom Bullough raconte son enfance difficile et solitaire, son repli sur lui-même après sa maladie, où il s’est jeté à corps perdu dans sa passion, les sciences. L’écriture déliée et sensible de Tom Bullough nous plonge alors dans un univers mêlant fiction et histoire avec harmonie parfaite. Plus proche du conte que de la biographie, chaque chapitre nous plonge dans un élément, parfois fondateur, parfois anecdotique, de la vie du petit Kostya, mais qui va forger sa personnalité, son caractère, et faire de lui ce petit génie qui deviendra l’homme qui calcula la force centrifuge. Les paysages de la Russe profonde, de ses mœurs, de ses habitants à la fin du XIXème siècle, donnent à son récit le décor d’un conte russe d’où semble vouloir surgir à chaque coin de page le merveilleux.

Je me suis vraiment laissée entrainer par sa plume, l’écriture n’a rien de recherché, rien de particulier, le roman est juste d’une fluidité très agréable et nous transporte avec une facilité surprenante. Vers la fin, le récit s’axe de plus en plus sur l’univers scientifique de Kostya, et ce qui n’était au début qu’une lubie d’enfant devient son véritable but existentiel, ce qui n’était qu’un rêve devient sa vie entière. Là, la science et l’invention du voyage spatiale commence à prendre de l’ampleur, et l’on à peur de devoir sombrer dans des explications et des théories scientifiques obscures qui pourraient nous perdre, mais Tom Bullough ne fait rien de cela. L’auteur utilise le fait que Konstantin est devenu professeur dans la ville de Borovsk à l’âge de 25 ans pour nous présenter ses travaux à travers les leçons qu’il donne à ses élèves, et nous démontre avec une simplicité désarmante les théories du génie.

Pour une fois je ne vais pas vous faire une longue chronique très détaillée du roman, parce que la conclusion est très simple. Mécaniques du ciel est un très beau roman, tout en délicatesse et en poésie, qui raconte avec simplicité la vie d’un grand homme qui a permit de réaliser le rêve de voyager dans l’espace.

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