Hanibal lecture
J'ai longtemps été fascinée par un seul genre littéraire, la fantasy, considérée par beaucoup comme de la para-sous-littérature-de-gare. Cela est on ne peut plus faux, et même si j'ai élargi mon champs de lecture aujourd’hui, la fantasy, le fantastique et la science-fiction restent mes genres favoris.
J'ai donc décidé de tester cette semaine le label Castelmore, le nouveau rejeton de Bragelonne (pour les non-initiés, détenteur en France de la majorité des littératures de l'imaginaire publiée), qui propose de la littérature pour ado. Eh oui, sachez que notre amie Stephenie Meyer (Stephy pour les intimes!) a lancé une mode qui met du temps à s’essouffler, la mode des vampires lycéens sexy transis d'amour ! Alors qu'autrefois il y avait Patrick Bruel et Brad Pitt, aujourd'hui il y a Justin Bieber et Robert Pattinson (Edwaaaaaaaaaaaaaard) qui font battre le cœur de nos jeunes teenagers et déclenchent des crises d'hystérie collectives.
Or, Bragelonne a bien surfé sur la vague Vampire avec sa collection Milady, mais les scènes de sexes n'étant pas adaptées pour l'innocence des fans de Justin, il fallait créer Castelmore (d’où le premier titre du label qui s’appelle Vampire Academy, quelle originalité !).
Trêve de sarcasmes, comme tout éditeur, Bragelonne (ainsi que Milady et Castelmore) publie de nombreux mauvais auteurs, mais aussi -et heureusement!- certaines perles.
C'est pour cette raison que je me suis penchée sur le cas de Kathleen Duey et sa saga Le prix de la magie...
La couverture du livre m'avait déjà tapé dans l'œil, mais la simple idée d'un roman jeunesse sur une école de magie m'avait d'entrée rebuté. Depuis Harry Potter, ce genre de scénario pullule et finit par lasser. Mais quelqu'un (et pas n'importe qui, la meilleure libraire jeunesse de l'ouest parisien s'il vous plait!) m'a fait changer d'avis sur sa lecture. Et puis, le fait que l'auteur a été finaliste du National Book Award (haute distinction littéraire pour nos amis anglo-saxons) m'a fortement intrigué. En France, il est rare de voir des romans de fantasy être nominés pour un prix littéraire aussi important (imaginer Damasio ou Jaworski en lice pour le Goncourt s’appelle de la science-fiction !).
Donc, j’ai tourné la première page du roman et… diable, c’est sacrément bon M’me Kathleen Duey !
Voici le résumé de l’histoire en quelques mots, pour vous familiariser avec l’atmosphère du roman :
Deux époques différentes, deux narrateurs. En premier la voix de Sadima, dont la mère est morte à sa naissance, négligée par une magicienne sensée l’assister dans l’accouchement. Son père et son frère, sa seule famille, exècrent les magiciens, aussi est-il difficile pour elle de leur cacher qu’elle-même possède des dons. En second lieu le récit de Haph, envoyé à l’école des magiciens par un père qui veut se débarrasser de lui.
Au premier coup d’œil donc, pas très original comme histoire. Mais il ne faut pas rester sur une première impression. Plus les récits de Sadima et Haph avancent, plus le roman devient intense. De son côté Sadima va rencontrer deux jeunes magiciens, Franklin et Somiss, dont le but est de refaire vivre la pure magie dans un monde où elle a été bannie. Haph quant à lui va découvrir la magie de façon extrême. Dans cette école, pas de réfectoire à la voûte étoilée ni de match de Quidditch. La classe comporte dix élèves et un seul d’entre eux survivra pour être magicien. Pour pouvoir manger, se laver et avoir accès à tout le confort d’un être humain, les apprentis doivent d’abord apprendre les dures leçons de leurs vieux et austères professeurs… Somiss et Franklin (et c’est l’un des mystères du roman qui tient en haleine ! Ces deux professeurs sont-il bien les deux amis de Sadima ? Qu’a-t-il bien pu leur arriver durant le temps qui sépare les deux récits ?).
La partie la plus réussie est sans conteste celle du jeune apprenti, et certainement celle qui illustre le mieux le titre du roman (ainsi que le titre anglais d’ailleurs : Skin Hunger). L’école ressemble en fait à une prison, et la manière dont les enfants sont traités pour apprendre la magie est totalement inhumaine. Plus le temps passe au sein de l’école, plus le récit de Haph se fait cru et douloureux. Les enfants sont sujets à la faim et la souffrance, et l’auteur réussit parfaitement à retranscrire ces sentiments dans sa prose. Le lecteur ressent les tourments de la privation, la faiblesse, la fatigue, le désespoir des enfants et la folie qui les gagne avec une violence rare. La fin du roman se termine sur un cliffhanger qui donne tout de suite envie de se jeter sur le second tome, et malheureusement pour moi, je ne pourrais pas la lire avant le mois prochain (imaginez ma frustration gnnnn grumphhh pffrrrttt… !).
Bon, ce que je considère comme la seule faiblesse du roman est la qualité inégale des deux récits. L’histoire de Sadima n’est pas toujours à la hauteur de l’intensité du récit de Haph. Son personnage au début très attachant s’efface peu à peu. Son don, qui est de communiquer avec les animaux, n’est pratiquement plus évoqué dans toute la seconde partie du récit et elle ne semble être là que pour dépeindre les personnages de Franklin et Somiss, ce que je trouve dommage.
Malgré ça, Le Prix de la magie reste un très bon roman, et je félicite l’auteur pour avoir su renouveler un thème si souvent remâché et en avoir fait une œuvre originale et captivante. Tiens, pour la peine je lui décerne le Guix Book Award, elle l’aurait bien mérité, et je m’en vais ronger mon frein jusqu’à ce que je puisse enfin lire le second tome !
Si vous voulez vous le procurer :
Et le blog de l’auteur pour les curieux :
Commentaires
Enregistrer un commentaire